Rupture du LCP : explication et traitement

Publié le : 9 septembre 2022 à 16h29

Article rédigé par Clément BOUDOT - MKDE

DESCRIPTION

Le ligament croisé postérieur (LCP) est l'un des quatre principaux ligaments de l'articulation du genou qui a pour fonction de stabiliser le tibia sur le fémur. Il a pour rôle majeur d'empêcher la translation postérieure du tibia sur le fémur. Dans une moindre mesure, le LCP résiste aux forces de varus, de valgus et de rotation externe. (Le valgus dynamique du genou: comment le repérer? Comment le modifier? )

Il est environ 1,3 à 2 fois plus épais et environ 2 fois plus résistant que le ligament croisé antérieur (LCA) et, par conséquent, moins souvent sujet à des lésions.

Les déchirures du ligament croisé postérieur ne sont donc pas aussi fréquentes que celles du ligament croisé antérieur. Elles sont rares en tant que blessure isolée et se produisent plus fréquemment dans un genou présentant des lésions multi-ligamentaires. Les hommes étant plus souvent impliqués dans les traumatismes du genou, ils sont donc plus souvent touchés par les lésions du LCP que les femmes, et l'âge moyen au moment de la blessure est entre 28 et 34 ans.

Bien que l'on sache que de nombreux patients peuvent tolérer un genou présentant une lésion du LCP, il est également bien connu que cette situation puisse entraîner une modification de la biomécanique et de la cinématique pendant les activités de la vie quotidienne ou les activités sportives, d’où l'intérêt d’une prise en charge optimale et adaptée à chacun.

 

ANATOMIE

D'une longueur moyenne de 36-38 mm et d'une surface transversale moyenne de 40-60 mm2 au niveau de la substance moyenne, le LCP est une structure ligamentaire intra-articulaire et extrasynoviale du genou. L'apport sanguin provient de l'artère géniculée moyenne. Des branches du nerf tibial innervent le complexe.

Le complexe du LCP est composé des faisceaux antéro-latéral (ALB) et postéro-médial (PMB) et des ligaments ménisco-fémoraux. Ils peuvent être bien différenciés à leur insertion fémorale, mais ils sont très compacts et difficiles à séparer à leur origine tibiale.

Faisceaux antéro-latéraux :

L'attache fémorale est presque deux fois plus grande que l'insertion tibiale. La distance entre les deux attaches est de 12,1 mm. L'attache fémorale est située à 7,4 mm du point trochléen, à 11,0 mm du point de l'arc médial et à 7,9 mm du cartilage articulaire distal. Le centre du site d'attache tibial se trouve à 6,1 mm de la racine du ménisque postéro-médial.

 

Faisceau postéro-médial :

L'attache fémorale du faisceau postéro-médial se situe à 11,1 mm du point de l'arc médial et à 10,8 mm du point postérieur du bord du cartilage articulaire.

 

Ligaments ménisco-fémoraux :

Le LCP est entouré par le ligament ménisco-fémoral antérieur (ligament de Humphrey) et le ligament ménisco-fémoral postérieur (ligament de Wrisberg), qui émergent de la face latérale du condyle fémoral médial et s'insèrent distalement près de la corne postérieure du ménisque latéral.

 

 

ÉTIOLOGIE

Compte tenu de la plus grande surface de section transversale et de la plus grande résistance à la traction du LCP par rapport au ligament croisé antérieur (LCA), les lésions du LCP sont associées à des traumatismes à haute énergie, comme on l'observe dans les blessures liées aux accidents de voiture ainsi qu’au sport. Cependant, les lésions du LCP sont également associées à des luxations du genou à faible et très faible vitesse survenant au cours des activités quotidiennes et affectant généralement les patients en surpoids.

 

ÉPIDÉMIOLOGIE

Malgré une incidence assez rare, estimée à 1-6% pour les déchirures isolées du LCP, une étude a montré que des lésions structurelles du LCP se produisent jusqu'à 38% chez des patients présentant des blessures aiguës du genou avec hémarthrose. Plus précisément, la plupart des lésions du LCP de grade III se présentent en même temps que d'autres lésions ligamentaires dans 79 % des cas. Par conséquent, plus de 60 % des lésions du LCP sont associées à des lésions capsulo-ligamentaires supplémentaires. Ces lésions associées sont celles du LCA dans 46 % des cas, du ligament médial collatéral dans 31 % des cas et du coin postéro-latéral dans 62 % des cas.

Les hommes sont plus souvent atteints que les femmes avec un ratio hommes/femmes de 2:1

 

DIAGNOSTIC & ÉVALUATION

Le patient présentant une déchirure du LCP se plaint souvent de symptômes tels qu'une instabilité ou une gêne. Un épanchement léger à modéré et une douleur à la face postérieure du genou ou à l'agenouillement sont également fréquents au stade aigu. Les symptômes des blessures chroniques sont généralement liés à des mouvements de décélération, comme la descente de pentes ou d'escaliers.

La majorité des tests pratiqués lors de l'examen clinique tentent de démontrer une instabilité postérieure ainsi qu’une subluxation du genou. Les tests les plus fréquemment utilisés sont le test d’avalement de la TTA, le test de Godfrey, le quadriceps active test et le test du tiroir postérieur. Cependant aucun de ces tests à eux seuls ne permettent de diagnostiquer une déchirure du LCP.

Plusieurs études d'imagerie peuvent être utilisées en complément de l'examen clinique pour le diagnostic d’une lésion du LCP. L'utilisation de techniques d'IRM a été démontrée comme étant très précise pour diagnostiquer les déchirures aiguës du LCP avec une sensibilité (près de 100%) et une spécificité (près de 97%) élevée ont été rapportées.

 

Les blessures du LCP sont classées sur une échelle de I à III :

  • Grade I (déchirure partielle) : translation postérieure de 1 à 5 mm. Le tibia reste antérieur aux condyles fémoraux.
  • Grade II (isolé complet) : 6-10mm de translation tibiale postérieure. Déchirure complète du LCP sans autre lésion. Le tibia antérieur affleure les condyles fémoraux.
  • Grade III (LCP complet avec lésion capsulaire et/ou ligamentaire combinée) : >10 mm de translation tibiale postérieure. Tibia postérieur aux condyles fémoraux, ce qui peut indiquer une lésion capsulo ligamentaire concomitante.

 

 

FACTEURS DE RISQUES

Il existe des différences significatives dans la morphologie osseuse entre les patientes souffrant d'une fracture par avulsion du LCP et celles qui n'en souffrent pas. L’étude de Fan et al., a montré que chez les femmes souffrant d'une fracture par avulsion du LCP l'indice de largeur de l'encoche inter condylienne (dans le plan coronal) était significativement plus petit, tandis que la pente médiale postérieure du tibia et la pente latérale postérieure du tibia étaient significativement plus élevées. En revanche, aucune de ces mesures n'avait d'incidence sur la fracture par avulsion du LCP chez les hommes. Ces résultats ont également démontré que les mesures morphologiques du genou, qui étaient principalement associées au risque de fracture par avulsion du LCP, diffèrent entre les hommes et les femmes.

 

TRAITEMENTS & PRÉVENTION

Les techniques de reconstruction du ligament croisé postérieur (LCP-R) ont été étudiées et ont évolué au cours des dernières décennies, fournissant une base solide et fondée sur des preuves scientifiques pour la gestion opératoire des blessures du ligament croisé postérieur (LCP). (Description générale et rééducation du ligament croisé postérieur chez les athlètes)

D'un autre côté, le LCP est caractérisé par une forte capacité de cicatrisation intrinsèque, ce qui fait de l'approche de traitement conservatrice une option viable, en particulier pour les déchirures partielles du LCP et les blessures par avulsion tibiale du LCP. De bons résultats subjectifs et objectifs à long terme après un traitement non-opératoire avec une prévalence assez faible de 11% d'arthrose modérée à sévère après plus de 14 ans de suivi, maintiennent le débat sur l'approche thérapeutique optimale, opératoire ou non, chez les patients blessés au LCP. Par conséquent, un large éventail d'options thérapeutiques viables est disponible, permettant une approche thérapeutique individualisée basée sur le modèle de blessure ainsi que les attentes du patient.

 

 

Il est donc admis que le LCP a une capacité intrinsèque de guérison. Cependant, il a été noté que cette cicatrisation se produit généralement dans une position laxe. La majorité des athlètes souffrant d'une déchirure isolée du LCP reprennent leur activité avec la rééducation, en obtenant la stabilité du genou par le renforcement musculaire pour compenser la translation tibiale postérieure. L'attelle pour LCP vise à compenser l'affaissement du tibia, en appliquant une contre-force antérieure, dans le but d'obtenir une guérison du LCP dans une position anatomiquement adéquate. Le genou est généralement immobilisé entre deux et quatre semaines en extension complète. Après cela, un programme encourageant le renforcement du quadriceps est préconisé. L'utilisation des ischio-jambiers est proscrite le temps de la cicatrisation pour éviter la translation tibiale postérieure. Les athlètes sont normalement autorisés à reprendre le sport lorsque le genou est complètement stabilisé et que la force du quadriceps atteint 90 % de celle du genou controlatéral, ce qui n'est souvent pas avant trois mois après la blessure, selon le sport. Des résultats objectifs et subjectifs contradictoires ont été rapportés dans la littérature.

 

Schéma adapté de l’étude de Winkler et al., de 2021

 

Un modèle de rééducation fut proposé par Winkler et al., dans son étude publiée dans le Knee Surgery, Sports Traumatology, Arthroscopy. Comme vu dans l’article sur le LCA (Rupture du ligament croisé antérieur (LCA) : explication et traitement) ceci reste un modèle proposé par des experts basés sur la temporalité à partir du moment de la blessure ou de la chirurgie. En effet les délais peuvent dans certains cas être rallongés ou alors raccourcis. Le fait d’avoir un genou sec et indolore est un des critères majeurs qui guidera la rééducation.

 

 

DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS

En raison du grand nombre de lésions associées, il faudra particulièrement être vigilant aux possibles atteintes méniscales (Lésions méniscales chez les athlètes) ainsi qu’au ligament collatéral interne et externe. Également l’atteinte du ligament croisé antérieur est à investiguer.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

Sources :

Vaquero-Picado, A., & Rodríguez-Merchán, E. C. (2017). Isolated posterior cruciate ligament tears: an update of management. EFORT open reviews, 2(4), 89–96. Article sous Creative Commons Attribution-Noncommercial 4.0 International licence (CC BY-NC 4.0)

Winkler, P. W., Zsidai, B., Wagala, N. N., Hughes, J. D., Horvath, A., Senorski, E. H., Samuelsson, K., & Musahl, V. (2021). Evolving evidence in the treatment of primary and recurrent posterior cruciate ligament injuries, part 1: anatomy, biomechanics and diagnostics. Knee surgery, sports traumatology, arthroscopy : official journal of the ESSKA, 29(3), 672–681. Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International License.

Winkler, P. W., Zsidai, B., Wagala, N. N., Hughes, J. D., Horvath, A., Senorski, E. H., Samuelsson, K., & Musahl, V. (2021). Evolving evidence in the treatment of primary and recurrent posterior cruciate ligament injuries, part 2: surgical techniques, outcomes and rehabilitation. Knee surgery, sports traumatology, arthroscopy : official journal of the ESSKA, 29(3), 682–693. Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International License.

Fan, N., Zheng, Y. C., Zang, L., Yang, C. G., Yuan, S., Du, P., Liu, Y. M., Zhao, Q., & Wang, J. W. (2021). What is the impact of knee morphology on posterior cruciate ligament avulsion fracture in men and women: a case control study. BMC musculoskeletal disorders, 22(1), 100. Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International License.

Raj, M. A., Mabrouk, A., & Varacallo, M. (2022). Posterior Cruciate Ligament Knee Injuries. In StatPearls. StatPearls Publishing. Article sous Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International License.

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