Généralités sur le syndrome fémoro-patellaire

Publié le : 17 avril 2022 à 09h13

Article rédigé par Blandine MAUDHUIZON - MKDE

Le syndrome fémoro-patellaire (SFP) est un trouble musculo-squelettique courant dans la population générale, principalement chez les adolescentes et les jeunes athlètes. Ce n'est pas un problème structurel simple. Il est susceptible d'être lié à une perturbation de l'homéostasie tissulaire due à une surcharge des tissus. La contrainte dépend d’une part de la charge appliquée, d’autre part de la surface de contact entre la rotule et le fémur.

Pour avoir une idée de la charge exercée lors de mouvements fonctionnels, voici quelques exemples : 

  • dans les escaliers: 3,3 x le poids corporel 
  • en position accroupie: 7,6 x poids du corps
  • en sautant: 30 x le poids du corps 

Toute charge « « anormale » peut endommager les tissus et perturber l'homéostasie tissulaire.

 

Symptômes subjectifs

Le SFP est difficile à définir, car les patients présentent une variété de symptômes et peuvent avoir différents niveaux de douleur et de déficience physique. 

Les symptômes sont généralement aggravés par des activités à « charge fémoro-patellaire » élevée, notamment en squat, fentes, descente des escaliers, course en descente, mais aussi par des périodes prolongées en flexion, comme la station assise. La plupart des patients rapportent une sensation de raideur, en particulier lors de la flexion du genou, mais gardent habituellement toute l’amplitude de mouvement. 

Diagnostic différentiel : 

La localisation de la douleur est un indicateur essentiel au diagnostic. En effet, si l’athlète rapporte une douleur localisée sous le genou, on peut supposer une inflammation du coussinet adipeux de Hoffa. Si la palpation du tendon patellaire est sensible, une tendinopathie est probable, bien qu’il faille évidemment combiner d’autres tests pour affirmer chaque diagnostic. Il faut aussi différencier le SFP de la bursite pré-patellaire, où la douleur est surtout présente en étant à genoux. La sensibilité et le gonflement autour de la tubérosité tibiale chez les adolescents peuvent indiquer Osgood-Schlatter. C’est donc en excluant d’autres pathologies que l’on peut identifier le SFP. Globalement, l’athlète souffrant de SFP décrit une douleur autour et sous la patella, plutôt diffuse.

FACTEURS DE RISQUE (2,3)

L’origine de ce syndrome est souvent multifactorielle. Il est donc important de noter que les facteurs de risques mentionnés par la suite ne se produisent pas isolément, mais bien souvent en lien les uns avec les autres.

Dans un premier temps, nous pouvons identifier des facteurs attribués aux caractéristiques individuelles, que l’on appelle facteurs intrinsèques. Ces derniers peuvent être:

Anatomiques : (controversé par Pappas and Wong-Tom (2012) qui estiment que l’alignement statique n’est pas significatif)

  • Antéversion du col fémoral
  • Angle Q* : mesuré par l'angle entre une ligne allant de la crête iliaque supérieure antérieure au milieu de la patella et une ligne partant de la tubérosité tibiale antérieure au milieu de la patella. Théoriquement, un angle Q plus élevé suggère une tendance au SFP.  
  • Dysplasie trochléenne
  • Patella alta et baja: La fonction intrinsèque de la patella est d'augmenter le bras de momentum et donc la force d'extension effective du muscle quadriceps. La position de la patella par rapport à la trochlée a un rôle crucial sur la stabilité fémoro-patellaire, mais aussi sur les douleurs potentielles. Patella Alta fait référence à une position anormale et plus proximale de la patella par rapport au fémur. Cela entraîne un retard de l'engagement patellaire dans la rainure pendant la phase précoce de flexion, avec des forces de compression plus importantes et la zone de contact diminuée.

 

Biomécaniques : 

  • Faiblesse musculaire du quadriceps (du vaste médial par exemple)
  • Les athlètes ont parfois un angle d’insertion différent et une fixation plus large du vaste médial. Son rôle est d’aider à stabiliser la patella dans la trochlée en extension en fin de course, pour maximiser la surface de contact. Certaines études ont montré une atrophie isolée du vaste médial et un délai du temps d’activation chez les patients symptomatiques par rapport aux patients en bonne santé. 
  • Manque de souplesse du quadriceps
  • Adduction et rotation interne excessives de hanche lors de la marche (observé chez la femme, mais pas chez l’homme). Rétrospectivement, J. van Cant et al. ont observé que les patientes présentant un SFP avaient une force musculaire réduite en extension, abduction et rotation externe de hanche. Cependant, les études prospectives n'ont pas trouvé de relation causale entre la faiblesse de la hanche et le développement du SFP (MS Rathleff et al). Il est donc possible que la faiblesse musculaire de la hanche soit un résultat plutôt qu'une cause de cette condition. Notons tout de même le rôle essentiel de la hanche lors des mouvements dynamiques tels que le squat sur une jambe, ou lors de la course. Cela souligne l'importance des tests dynamiques dans l'évaluation des facteurs de risque.
  • Valgus excessif lors de l’atterrissage*, qui a été détaillé dans cet article : Le valgus dynamique du genou: comment le repérer? Comment le modifier? 
  • Posture dynamique du pied (avec une rotation interne et une éversion de l’arrière-pied) Il existe des preuves non concluantes et contradictoires sur la relation entre la mécanique du pied et le développement ou la présence du SFP.
  • Technique de course 

 

*Suite à la méta-analyse de BS Neal et al. , les éléments suivants ne sont plus considérés comme des facteurs de risque: force musculaire des fessiers, des ischio-jambiers; l'âge, la taille, le poids, l’angle Q; le valgus du genou lors du saut et de l’atterrissage.

Par ailleurs, des facteurs extérieurs au corps peuvent avoir un rôle dans l’apparition des symptômes, ce sont les facteurs extrinsèques. Parmi ces éléments, on trouve : le type et le volume d'activité sportive, les conditions environnementales, la surface de jeu et l'équipement utilisé. Très souvent, il s’agit d’erreur dans le dosage de l’entraînement 

 

 

Traitement par l’exercice 

Les différents traitements sont mentionnés dans cet article Prise en charge du syndrome fémoro-patellaire. En tant qu'intervention non chirurgicale, la kinésithérapie est largement utilisée pour traiter le SFP. 

Au début de la prise en charge, il est intéressant d’identifier la cause du problème. C'est-à-dire, déterminer si l’apparition des symptômes est liée à la biomécanique, à la charge, ou aux deux combinés par exemple. En fonction de ce que l’on observe, il peut être important de réduire voire arrêter le mouvement douloureux. L’objectif est de retrouver des niveaux de base sans douleur, cependant, il faut éviter le repos complet. L’exercice peut être débuté à condition qu’il soit effectué en infradouloureux. Ensuite, il faut recharger progressivement en renforçant toute la chaîne cinétique, avec des programmes d'exercices ciblant les muscles des membres inférieurs, de la hanche et du tronc. 

Il est difficile de fournir des recommandations cliniques claires, car la plupart des études ont montré une grande variabilité en termes de durée de programme, de volume (nombre de répétitions, de séries ou d'exercices), ou de type de protocole. Des recherches supplémentaires sont donc nécessaires pour limiter la forte hétérogénéité des programmes d'exercices.  

Néanmoins, il existe des preuves solides qu'un programme d'exercices combinés de la hanche et du genouest un traitement efficace pour soulager la douleur et améliorer la fonction, plutôt que proposer un programme uniquement pour le genou. Par ailleurs, dans les premiers stades de la rééducation, des études soutiennent l'utilisation du renforcement des muscles de la hanche lorsque ceux du genou provoquent une douleur supplémentaire. 

Notons que la plupart des exercices ciblant les muscles de la hanche affectent également indirectement le genou. 

Dans les études comparant différents programmes de renforcement, les exercices de la hanche ont été recommandés à des fins de renforcement, c'est-à-dire trois séries de 10 à 15 répétitions. Il semblerait que l'endurance musculaire doive également être augmentée, ce qui pourrait se traduire par davantage de répétitions, à savoir trois séries de 20 à 30 répétitions, en particulier pour les patients qui sont impliqués dans des sports plus spécifiques à ce type d’effort tels que la course et le saut (3).

Les exercices peuvent se faire en chaîne fermée, ce qui est souvent recommandé comme traitement initial, avec des mini-squat par exemple (0-45° de flexion) où la contrainte sur l’articulation fémoro-patellaire est moindre. Cela est donc généralement mieux toléré par les patients. L’utilisation d'exercices en chaîne ouverte est tout aussi utile. Cela peut se faire avec un élastique en extension, ou avec une machine d’extension de genou. 

Il semble intéressant d’inclure des deux, avec la co-contraction des quadriceps et fessiers. Un facteur important souligné dans des revues récentes est que les exercices doivent être indolores.

 

Comme pour toute rééducation, il est important d’adapter le programme en fonction des objectifs de l’athlète. La douleur fémoro-patellaire étant très répandue chez les coureurs, plusieurs stratégies de modification peuvent être apportées pour réduire la charge fémoro-patellaire lors de la course:

  • en modifiant l’appui: transférer davantage le poids vers l’avant-pieds ou médio-pieds, plutôt que l’attaque talon (Bonaccietal.(2013)
  • en réduisant la longueur de foulée / en augmentant la cadence (augmenter de 10% en se rapprochant de 170-180 foulées par minute) (Heidershecitetal.2011, Chumanov et al. 2012, Hobara et al. (2012)
  • en réduisant l'adduction de la hanche, avec l’idée de "ne pas courir sur un fil" (Nohrenetal. (2011)

 

Conclusion

Le syndrome fémoro-patellaire est illustré par une douleur autour ou derrière la patella, aggravé par la charge des activités fonctionnelles telles que la marche, la course, le saut, la montée d'escaliers et la position assise et agenouillée prolongée. Il se trouve que l'exercice d'entraînement neuromusculaire est l'une des méthodes les plus efficaces pour diminuer la douleur musculo-squelettique et améliorer la fonction du genou. Il est primordial de gérer la charge et la fréquence dans le plan d’entraînement, en soulignant bien que chaque exercice doit être tolérable et non excessif.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

À lire également :

Tendinopathie patellaire : description et traitements

Pathologies du jeune athlète: Syndrome d'Osgood Schlatter et Sinding Larsen Johansson

Revue des connaissances actuelles de la prise en charge du syndrome de la bandelette ilio-tibiale (2021)

 

Sources : 

Manojlović, D., Kozinc, Ž., & Šarabon, N. (2021). Trunk, Hip and Knee Exercise Programs for Pain Relief, Functional Performance and Muscle Strength in Patellofemoral Pain: Systematic Review and Meta-Analysis. Journal of pain research, 14, 1431–1449. Articles sous Creative Commons Attribution – Non Commercial License (CC BY NC 3.0)

Vora, M., Curry, E., Chipman, A., Matzkin, E., & Li, X. (2018). Patellofemoral pain syndrome in female athletes: A review of diagnoses, etiology and treatment options. Orthopedic reviews, 9(4), 7281. Article sous Creative Commons Attribution Non-Commercial License (CC BY NC 4.0)

Halabchi, F., Abolhasani, M., Mirshahi, M., & Alizadeh, Z. (2017). Patellofemoral pain in athletes: clinical perspectives. Open access journal of sports medicine, 8, 189–203. Article sous Creative Commons Attribution – Non Commercial License (CC BY NC 3.0)

 

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