Nutrition et développement des jeunes athlètes

Publié le : 7 novembre 2023 à 15h10

Article rédigé par MAUDHUIZON Blandine - MKDE

L'adolescence est une période de croissance et de développement physique importants qui comprend des changements dans la composition corporelle, des fluctuations métaboliques et hormonales, et la maturation des systèmes organiques, qui peuvent tous affecter la santé future du jeune sportif. Du point de vue de la nutrition, l'adolescence est également une période importante pour établir la relation d'un individu avec la nourriture tout au long de sa vie, ce qui est particulièrement important en termes de lien entre l'alimentation, l'exercice et l'image corporelle. Les défis de la gestion du temps et les périodes d'émotions fluctuantes sont également caractéristiques de cette période.

L'exercice régulier offre de nombreux avantages aux adolescents, notamment l'interaction sociale, l'amélioration de la santé physique et le développement de l'identité et de l'estime de soi

Tout au long de l'adolescence, une énergie adéquate est nécessaire pour répondre à la fois aux besoins de croissance et de développement de l'individu, ainsi qu'aux demandes associées à l'activité physique générale, à l'entraînement et à la compétition. Bien qu’elles puissent varier considérablement, des estimations de la dépense énergétique chez les athlètes adolescents sont disponibles : pour les garçons ~ 3640 ± 830, et les filles ~ 3100 ± 720 kcal/jour.

La détermination des besoins énergétiques individuels des athlètes adolescents est encore compliquée par la variabilité métabolique et hormonale au sein et entre les individus, ainsi que par les difficultés méthodologiques pour estimer à la fois l'apport énergétique et la dépense énergétique.

 

La croissance pendant la puberté est directement liée aux changements hormonaux qui accompagnent le développement sexuel. Alors que les filles commencent généralement leur poussée de croissance et atteignent leur pic maximal 2 ans plus tôt que les garçons (~ 12 ans pour les filles contre ~ 14 ans pour les garçons).

Les besoins énergétiques pour la croissance se composent de deux parties : l'énergie dépensée pour synthétiser de nouveaux tissus et l'énergie déposée dans les tissus en croissance.

Les symptômes potentiels de carence énergétique relative dans le sport chez les jeunes qui entreprennent un entraînement intensif sont courants. Nous avons rédigé un article sur ce sujet : Qu’est-ce que la déficience énergétique relative dans le sport? 

Chez les athlètes en développement, un manque d’énergie disponible peut entraîner un certain nombre de conséquences graves pour la santé, notamment une puberté retardée, des irrégularités menstruelles, une mauvaise santé osseuse, une petite taille, le développement de comportements alimentaires désordonnés et un risque accru de blessure

 

Macronutriments nécessaires pour le développement de l’athlète

  • Protéines

Les adolescents ont besoin de protéines pour soutenir la croissance et le développement général, en plus d'améliorer la réponse à l'entraînement physique. Pendant le pic de croissance, l'augmentation de la masse corporelle maigre peut atteindre ~ 2,3 g/jour chez les filles et ~ 3,8 g/jour chez les garçons, ce qui représente environ trois fois plus qu’à la période prépubère. De plus, les données longitudinales indiquent que les jeunes physiquement actifs accumulent des augmentations plus importantes de la masse corporelle maigre que leurs pairs sédentaires.

L'apport énergétique total est une considération importante dans l'évaluation des besoins en protéines. Avec un apport énergétique sous-optimal, les protéines endogènes sont mobilisées, ainsi que le glycogène hépatique, pour maintenir l'homéostasie de la glycémie, réduisant potentiellement la disponibilité des protéines pour ses fonctions principales. À condition que l'énergie consommée soit adéquate, il semble que les recommandations en matière de protéines pour maximiser l'équilibre net du corps entier après l'exercice sont principalement influencées par le corps total et la masse sans graisse. L'apport en protéines à  ~ 0,11 g/kg/h pendant la récupération post-exercice, ou l'équivalent de  ~ 1,5 g/kg/jour (par exemple  ~ 0,3 g de protéines/kg × 5 repas), devrait être suffisant pour remplacer tout apport induit par l'exercice. Les pertes oxydatives d'acides aminés améliorent l'équilibre protéique net du corps entier et soutiennent la croissance et le développement normaux des athlètes adolescents.

 

  • Glucides

La durée et l'intensité des séances d'exercice déterminent les schémas d'utilisation des glucides. De plus, la disponibilité de glucides exogènes et endogènes influence les adaptations d'entraînement médiées par l'exercice.

Pendant de courtes périodes d'exercice (c'est-à-dire d'une durée  < 1 h), de petites quantités de glucides peuvent être bénéfiques pour la performance, en particulier si l'athlète n'a pas mangé avant l'exercice. 

Pour un sport d'endurance, lors d’exercices d'une durée  > 90 min, les glucides sont susceptibles d’améliorer les performances.

 

  • Lipides (Graisses)

Un apport alimentaire adéquat en graisses est nécessaire pour répondre aux besoins en vitamines liposolubles et en acides gras essentiels, et contribue à fournir de l'énergie pour soutenir la croissance et la maturation. De plus, des preuves suggèrent que les taux maximaux d'oxydation des graisses (par rapport à la masse maigre) semblent légèrement plus élevés chez les athlètes < 18 ans.

 

Étant donné que des apports élevés en matières grasses sont associés à un risque accru de maladie chronique, la recommandation pour le type et l'apport total en matières grasses par les athlètes adolescents reste conforme aux directives de santé publique. En règle générale, ces lignes directrices suggèrent un apport en graisses alimentaires de 20 à 35 % de l'énergie totale, les acides gras saturés ne fournissant pas plus de 10 % de l'apport énergétique total.

 

Micronutriments

  • Fer

En termes de performances, même de légères diminutions tissulaires du fer peuvent affecter négativement la capacité d'endurance et l'adaptation aérobie à l'entraînement.

Les recommandations concernant le fer pour les filles en développement tiennent compte de la perte de fer due aux menstruations. Bien qu'une valeur de référence de population soit souvent utilisée comme seuil d'âge pour la ménarche* (par exemple 14 ans), les recommandations individuelles doivent être ajustées lorsqu'il existe des différences individuelles (en particulier lorsque la ménarche survient plus tôt). 

Il est possible que les athlètes végétariens aient des besoins accrus en raison de la faible biodisponibilité en fer des sources de fer non héminique. Cependant, les résumés des avis scientifiques indiquent que lorsque l'on compare les végétariens aux non-végétariens, la plupart des études ne démontrent aucune différence significative dans l'apport alimentaire en fer ou les concentrations d'hémoglobine

Le fer héminique se trouve uniquement dans les aliments d'origine animale, car il est lié à des protéines telles que l'hémoglobine. En revanche, le fer non héminique est présent dans la plupart des aliments, qu'ils soient d'origine animale ou végétale.


* La ménarche se réfère au début des premières menstruations chez les femmes, marquant ainsi la première occurrence de saignements menstruels dans le cadre de son cycle ovulatoire.

 

  • Calcium

Les besoins en calcium tout au long de la vie sont les plus élevés pendant la poussée de croissance pubertaire. Le taux d'accrétion squelettique de calcium pendant l'adolescence est estimé à environ 300 mg/jour. Il n'y a actuellement aucune recommandation spécifique pour l'apport en calcium pour les athlètes, par conséquent, jusqu'à ce que d'autres études soient entreprises, les normes de référence de la population peuvent être utilisées comme référence. Les recommandations de calcium sont basées sur des estimations des pertes urinaires et sudoripares et supposent une absorption nette de calcium par les aliments (souvent  ~ 25–35%). Les recommandations pour les adolescents varient selon les régions, avec des valeurs allant de 800 mg/jour (par exemple, les femmes britanniques âgées de 15 à 18 ans) à 1 300 mg/jour (États-Unis, Canada, Australie pour les hommes et les femmes âgés de 14 à 18 ans). 

 

  • Vitamine D

Bien que la vitamine D soit surtout connue pour son rôle dans la santé des os, elle a de nombreuses fonctions dans d'autres systèmes physiologiques (par exemple, le système immunitaire, le système musculaire). L'insuffisance en vitamine D est également liée à la fonction musculaire squelettique, à la douleur, à la faiblesse musculaire, à l'inflammation et peut potentiellement augmenter la susceptibilité aux blessures et ralentir le taux de réadaptation après une blessure. Par conséquent, le statut en vitamine D (en particulier chez les athlètes adultes) a récemment fait l'objet d'une attention scientifique considérable. Pour autant, actuellement, l'influence du statut en vitamine D et les bénéfices de la supplémentation chez les jeunes athlètes identifiés comme déficients restent largement méconnus.

 

Hydratation

Les jeunes individus semblent avoir une capacité similaire à celle des adultes à gérer les charges thermiques et le temps de tolérance à l'exercice pendant l'exercice à la chaleur. Cependant, les mécanismes par lesquels les jeunes individus dissipent les charges thermiques pendant l'exercice diffèrent de ceux des adultes. Les enfants et les adolescents semblent compter davantage sur la redistribution du sang périphérique (refroidissement radiatif et conducteur) que sur la transpiration (refroidissement par évaporation) pour maintenir l'équilibre thermique. Il existe également des preuves que les adolescents qui s'entraînent régulièrement s'adaptent par une vasodilatation périphérique accrue, ce qui est susceptible d'améliorer le refroidissement sans évaporation

Il n'existe aucune preuve permettant de déterminer dans quelle mesure l'apport hydrique peut moduler le risque de malaise dû à la chaleur chez les athlètes adolescents. Par conséquent, les directives d'apport hydrique pour les jeunes athlètes sont similaires à celles recommandées pour les adultes. Ces conseils incluent de commencer l'exercice bien hydraté, de développer des plans de consommation individualisés (affinés régulièrement pendant la puberté pour s'adapter aux changements du taux de sudation), de limiter les pertes de masse corporelle pendant l'activité à  ≤ 2 % par rapport aux valeurs pré-exercice et d'éviter la prise de poids. En général, des apports hydriques de 13 ml/kg par heure d'exercice devraient être suffisants pour éviter des déficits hydriques importants chez les athlètes en développement.

 

Enfin, les athlètes en développement peuvent ne pas reconnaître les signes ou les symptômes du stress dû à la chaleur, oublier de boire à moins qu'on le leur rappelle et continuer à faire de l'exercice pour suivre le rythme de leurs pairs. Par conséquent, il est important que lorsque des facteurs environnementaux et contextuels se combinent pour augmenter les risques de thermorégulation (par exemple, intensité/durée de l'exercice, vêtements, disponibilité des liquides), des stratégies visant à modérer les charges thermiques métaboliques chez les jeunes athlètes soient mises en œuvre de manière proactive.

 

Conclusion 

Les jeunes athlètes ont des besoins nutritionnels uniques en raison de leur charge d’entraînements quotidiens, en plus des exigences de croissance et de développement. L'athlète doit être encouragé à modérer ses habitudes alimentaires pour refléter les exigences quotidiennes en matière d'exercice et fournir une répartition régulière de sources de glucides et de protéines de haute qualité tout au long de la journée, en particulier dans la période qui suit immédiatement l'entraînement. Une attention particulière doit également être accordée au risque potentiel de déficience énergétique ainsi qu'à l'apport alimentaire en calcium, vitamine D et fer des jeunes athlètes en raison du risque de carence et des besoins élevés.

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

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Source: 

Desbrow B. (2021). Youth Athlete Development and Nutrition. Sports medicine (Auckland, N.Z.), 51(Suppl 1), 3–12. Article sous CC BY 4.0 Licence

MAUDHUIZON Blandine (Rédactrice NeuroXtrain)

Kinésithérapeute en cabinet libéral à Paris, après avoir exercé un an à Nantes, notamment au sein du centre de formation de Nantes Basket Hermine. A combiné sa volonté d’aider les autres avec sa passion pour le sport, allant du yoga au tennis, en passant par la course à pied

Réalisation de diverses formations : 

  • Pilate et kinésithérapie - Physioacadémie (2022)
  • Nouveautés dans la prévention des blessures en course à pied 1.0 - La Clinique du Coureur (2022)
  • Rééducation pelvi-périnéale - Santé Formapro (2021)
  • Pathologies de la cheville : de la prise en charge à la reprise d'activité - Santé Formapro (2021 

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