Œdème osseux : explication et traitement

Publié le : 16 janvier 2024 à 15h40

Article rédigé par Clément BOUDOT - MKDE du sport

Introduction

L’œdème osseux est une présentation clinique relativement rare. Cette pathologie a été peu rapportée dans la littérature. Par conséquent, le personnel médical ne connait pas encore suffisamment la pathologie et est enclin à faire des erreurs de diagnostic et de traitement. Cela peut sans aucun doute prolonger l'évolution de la pathologie, réduire la qualité de vie des patients et même affecter leurs fonctions.

L’œdème osseux est un diagnostic d'exclusion qui se caractérise par des douleurs et une augmentation du liquide interstitiel dans la moelle osseuse sans cause évidente. Il est souvent mal diagnostiqué, car sa présentation clinique est très variable et non spécifique.

Anatomie

L’os est un tissu vivant qui répond à la charge imposée par son environnement tout comme les tendons et les muscles. Les cellules clés responsables de cette adaptation sont les ostéoblastes, les ostéoclastes et les ostéocytes.

Un os long (ex : fémur) contient trois parties distinctes : l’épiphyse aux deux extrémités et la diaphyse au centre. Une couche externe recouvre l’os qui est le périoste. Pour les os longs dans la diaphyse se trouve la moelle osseuse jaune et dans l’épiphyse de la moelle osseuse rouge. 80% du squelette osseux est composé d’os cortical et 20% d’os trabéculaires.

L’os cortical est fait d’os d’ostéons regroupés entre eux autour des canaux de Havers où circulent les éléments vasculo-nerveux.

L’os trabéculaire ou os spongieux est constitué de lamelles qui se rejoignent entre elles formant un réseau tridimensionnel. L’os spongieux est en contact avec la moelle osseuse qui permet un échange cellulaire important. L’os spongieux est quant à lui beaucoup plus sensible à la contrainte que l’os cortical et son orientation dépend fortement des contraintes qui lui sont imposées.

 

 

Étiologie

En général, une étiologie traumatique aiguë pure est la cause principale de l’œdème osseux chez les athlètes souvent présent lors d’une rupture du LCA par exemple. Mais dans certains cas cette pathologie peut également résulter d'un traumatisme répétitif ou chronique. Une contrainte répétée déclenche une réaction de stress dans l'os, qui peut entrainer une hypertrophie et un remodelage trabéculaire. Biologiquement, l'os répond au stress répétitif par un déséquilibre entre l'activité des ostéoclastes et ostéoblastes. Ceci entraine une altération du renouvèlement osseux et donc un affaiblissement de l'os lui-même. Dans un premier temps, l'os s'adapte en formant un nouvel os périosté pour fournir un soutien structurel. Si la source de stress persiste, il y a une augmentation significative de l'activité ostéoclastique au détriment de l'activité ostéoblastique, ce qui entraine des micro-fractures. Les travées osseuses soumises à ce processus forcé présentent des micro-fractures, accompagnées de la présence d’œdème osseux à l'IRM.

 

Épidémiologie

Le syndrome de l'œdème osseux touche les membres inférieurs dans 98 % des cas et rarement les membres supérieurs. Les hommes d'âge moyen (entre 30 et 60 ans) et les jeunes femmes (entre 20 et 40 ans) sont les plus susceptibles d'être touchés, avec une incidence de 3 pour 1 chez les hommes et les femmes respectivement. Le syndrome de l'œdème osseux est souvent un phénomène migratoire et se produit de manière bilatérale chez 41 % des patients.

 

Diagnostic et évaluation

De nombreuses études scientifiques ont révélé que l’œdème osseux peut être présent chez les athlètes asymptomatiques. Les symptômes ne sont pas spécifiques, mais comprennent l'apparition d'une douleur, qui est initialement tolérable et n'affecte pas la performance de l'activité physique. Au cours de cette phase, l'athlète continue à s'entrainer, soumettant l'articulation à des contraintes plus importantes, ce qui provoque une réaction de stress qui peut dégénérer en fracture de stress. À ce jour, on ne sait toujours pas s'il existe une corrélation significative entre l’œdème osseux et les symptômes cliniques, car les études actuelles sont contradictoires.

Les radiographies commencent généralement à montrer une ostéopénie un ou deux mois après l'apparition des symptômes. Une tomodensitométrie (TDM) peut être demandée pour évaluer la déminéralisation locale, ainsi que pour exclure d'autres causes de douleur et de gonflement, telles qu'une tumeur maligne ou une infection. Néanmoins, l’IRM est le meilleur examen, car l'œdème peut être détecté dans les deux jours suivant l'apparition des symptômes. L'IRM montrera une diminution du signal sur les images pondérées en T1 et une augmentation du signal sur les images en T2 et STIR.

L'analyse sanguine est généralement négative, mais il peut y avoir une diminution du taux de vitamine D. Cette découverte peut également justifier un test de densité minérale osseuse et un traitement si nécessaire.

 

 

Facteurs de risques

Une augmentation brutale de la charge d’entrainement est un facteur de risque majeur dans le cadre d’apparition des œdèmes osseux atraumatiques. En effet, comme vu précédemment, une charge trop importante ne laisse pas le temps à l’os de se renouveler, déséquilibrant ainsi l’homéostasie osseuse.

D’autres facteurs de risque connus comprennent la carence en vitamine D, l'anémie, la grossesse tardive, les troubles du métabolisme osseux, la cirrhose, les troubles du métabolisme des lipides, la chimiothérapie et la radiothérapie.

 

Traitement et prévention

Le syndrome de l'œdème osseux étant spontanément résolutif, l'objectif du traitement est avant tout la prise en charge des symptômes. La mise en décharge de la région affectée peut aider à contrôler la douleur, tandis que les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et la kinésithérapie restent les piliers de la gestion des symptômes. Il existe également des preuves que le traitement par la nifédipine (un inhibiteur calcique) et le blocage du nerf sympathique peuvent apporter un soulagement substantiel dans le traitement de l’œdème osseux.

 

 

L'iloprost est un analogue de la prostacycline qui a toujours été utilisé dans le traitement de l'ischémie critique, mais il a également été démontré qu'il améliorait la fonction et la douleur chez les patients ayant un œdème osseux. Il convient de noter que les analogues de la prostacycline sont contrindiqués chez les patients recevant des anticoagulants et pendant la grossesse, une comorbidité fréquente chez les patients ayant un œdème osseux.

Un régime de bisphosphonates et une supplémentation en vitamine D peuvent également être utilisés pour augmenter l'anabolisme et la revascularisation de l'os. L'ibandronate et d'autres bisphosphonates contenant de l'azote ont montré qu'ils avaient un effet analgésique en plus de leurs effets anabolisants sur le tissu osseux.

Les ondes chocs semblent être une option thérapeutique pour les patients souffrant d’œdème osseux. Plusieurs études ont mesuré leurs effets sur des patients ayant un œdème osseux sur la hanche. Leur fonction et douleur semblent avoir été améliorées à 1, 3 et 6 mois.

Le traitement par onde de choc peut contribuer à normaliser les vaisseaux sanguins endommagés et le métabolisme des patients. Les ondes de choc ont des effets sur la réparation des tissus, la vasodilatation et l'angiogenèse, l'analgésie et l'anti-inflammation, qui peuvent être responsables de la réduction de l'œdème osseux et de la douleur, ainsi que de l'amélioration de la fonction de la hanche.

 

Diagnostics différentiels

Le syndrome de l'œdème osseux est un diagnostic d'exclusion et, par conséquent, les thérapeutes doivent disposer d'un large éventail de diagnostics différentiels lorsqu'ils envisagent ce diagnostic. Les traumatismes, les tumeurs malignes, les infections, l'ostéonécrose, le syndrome douloureux régional complexe et les fractures de stress sont quelques-uns des nombreux diagnostics qui doivent être envisagés chez un patient souffrant de douleurs et d'un œdème osseux important.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

À lire également :

 

Sources :

Tarantino, U., Greggi, C., Cariati, I., Manenti, G., Primavera, M., Ferrante, P., Iundusi, R., Gasbarra, E., & Gatti, A. (2021). Reviewing Bone Marrow Edema in Athletes: A Difficult Diagnostic and Clinical Approach. Medicina (Kaunas, Lithuania), 57(11), 1143. Article sous Creative Commons Attribution (CC-BY) license.

Li, S., Yu, H., Long, S., Li, J., He, Y., Zheng, X., Yang, S., Tang, Y., Xie, Q., & Zheng, W. (2023). Research Advances in the Treatment of Bone Marrow Edema Syndrome. Journal of clinical densitometry : the official journal of the International Society for Clinical Densitometry, 26(2), 101367. Article sous Creative Commons Attribution Non Commercial Non Derivs 4.0 internationnal.

Davis, D. D., & Kane, S. M. (2023). Bone Marrow Edema Syndrome. In StatPearls. StatPearls Publishing. Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International license (CC BY 4.0).

 

BOUDOT Clément (Rédacteur NeuroXtrain)

 

Kinésithérapeute passionné de sport, ayant pratiqué pendant plusieurs années du foot au FC Saint-Orens, puis du rugby au Rugby Club Quint Fonsegrives, pratiquant maintenant la course à pied et plus particulièrement le trail running.

Diplômé du D.U de kinésithérapie du sport à l'université de Nantes

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