Quelles sont les stratégies de récupération pour réduire les courbatures? 

Publié le : 1 novembre 2020 à 09h30

Article rédigé par Clément Boudot 

 

L’exercice physique induit une cascade d’adaptations physiologiques pour permettre au corps de s’adapter au stress mécanique entraîné par l’effort. Une des adaptations que le pratiquant peut ressentir après une séance de sport est appelée courbatures ou DOMS en anglais pour Delayed Onset Muscle Soreness. Les courbatures sont décrites comme étant des douleurs musculaires après un effort intense ou inhabituel qui atteint son pic généralement 48H après le facteur déclenchant.

Des déséquilibres électrolytiques, une infiltration et une accumulation de leucocytes dans le muscle stimulé, ainsi qu’une augmentation des cytokines pro-inflammatoires ont été constatés dans le cadre des courbatures. Les cytokines libérées entraînent une plus grande perméabilité vasculaire et des perturbations de la microcirculation car elles agissent comme médiateurs de l'inflammation. La présence de liquide interstitiel associée à un œdème intramusculaire et à un gonflement du compartiment ainsi que la présence de diverses substances inflammatoires sont décrites comme étant responsables de l'activation des nocicepteurs et de la sensation de douleur.

 

Caractéristiques biochimiques des courbatures

Il a été démontré que lors de courbatures, plusieurs marqueurs chimiques sont caractéristiques de ce phénomène. En effet, en réponse à la perte de l’intégrité du sarcolemme due à l’exercice et à la diminution de la perméabilité de la membrane plasmique, il se produit une augmentation des niveaux d'activité de la créatine kinase (CK), qui est l'un des principaux marqueurs indirects des micro-lésions musculaires. Plusieurs autres marqueurs, tels que l'interleukine 6 (IL-6), la protéine C-réactive (CRP), la pentraxine-3 (protéine présente lors de l’inflammation) ou la lactate déhydrogénase (LDH), sont présente en plus grande quantité lors de l'inflammation des tissus endommagés.

 

Courbatures, un nouveau mécanisme d’apparition? (Sonkodi et al. 2020)

En ce qui concerne la structure affectée lors de courbatures, des recherches récentes témoignent d’un mécanisme différent: en effet, les contractions excentriques à répétitions entraineraient des forces de compressions importantes à travers un « effet tunnel » sur le fuseau neuro musculaire au sein du muscle. Couplé à cela, un phénomène de stress aigu est mis en place par le SNS (Système Nerveux Sympathique) lorsque le muscle est « fatigué », mais qu’il doit toujours être actif pour performer. Toutes ces altérations entraîneraient alors cette sensation de courbature.

Dans le sport de haut niveau, la récupération est un élément clé de la réussite et doit faire partie de la planification de l’entraînement pour l’entraineur afin de permettre au sportif d’avoir des moments de repos dans sa saison pour éviter de se blesser.

Dans cet article nous allons détailler différentes stratégies nutritionnelles, mais aussi les stratégies passives (sommeil, vibrations) et actives (foam roller) pour diminuer les courbatures d’un point de vue physiologique ainsi que leur perception pour le sportif.

 

Le sommeil

Lors d’évènements sportifs importants, les athlètes ont moins de temps à accorder à la récupération, ils doivent donc se recentrer sur les bases et les méthodes les plus simples: le sommeil est un élément crucial du processus de récupération qui influera grandement sur les performances et le risque de blessure de l’athlète.

Les troubles du sommeil peuvent être causés par un entraînement matinal, une augmentation de la charge d'entraînement, les longs déplacements en cas de compétition, le décalage horaire et l'altitude. Cette réduction du temps de sommeil est associée à une diminution des performances physiques et mentales, tandis que des niveaux optimaux de sommeil (en quantité et en qualité) ont été associés à une augmentation des performances et à une réduction du risque de blessure. En fonction du type de sport, plus les demandes physiques et cognitives sont importantes, plus les performances sont sensibles à la variation de la durée du sommeil.

 

 

Comme le montre l’étude de Milewski et al., les athlètes qui dorment moins de 8 heures par nuit ont 1,7 fois plus de risques de blessures. Certaines études ont également montré un effet positif de l’augmentation du temps de sommeil sur les performances.

Une option prometteuse dans le cas d'une nuit de sommeil insuffisante pourrait être l'introduction de siestes, pour lesquelles une durée optimale de 30 minutes est recommandée.

Cependant, l’effet du sommeil sur les courbatures peine à être démontré et peu d’études s’y sont intéressées alors que son effet sur le risque des blessures et la performance n’est plus à prouver.

Une étude de Fullagar et al., à étudié les effets des stratégies d’hygiène du sommeil (= SHS) sur la récupération après un match de football dans la soirée (coup d'envoi 20h45). Les stratégies proposées lors de cette étude sont: d’éteindre tous les appareils électroniques (téléphone, télévision, ordinateur, tablettes etc.) au moins 30 min avant le coucher, avoir une chambre sombre, calme, une température basse (18°), et le port de masques de nuit si une obscurité totale dans la chambre ne peut pas être réalisée.

Les SHS (stratégies d’hygiène du sommeil) n’ont eu aucun effet objectifs ou subjectifs sur la récupération immédiatement et 48h après le match en comparaison au groupe n’ayant pas reçu les SHS.

Malgré un manque de recherche sur l’effet du sommeil sur les courbatures, une éducation sur les SHS et sur l’importance d’une durée minimum de 8 heures de sommeil doit être effectuée auprès des athlètes. En effet comme nous l’avons vu précédemment, un manque de sommeil peut induire un risque accru de blessure comme cité précédemment et peut également avoir un impact négatif sur les performances. Il peut aussi engendrer des changements dans le métabolisme du glucose ce qui peut augmenter les niveau de fatigue de l’athlète. La fonction neuro-endocrinienne peut également être affecté ce qui entrainerait des perturbations hormonales se répercutant sur la psychologie de l’athlète. La manque de sommeil pourrait également être responsable d'une altération de l'état d’esprit traduite par une augmentation du risque de dépression, de l’anxiété, de la confusion, de la fatigue, de la colère, et une diminution de l’attention.

 

Les vibrations pour réduire les courbatures?

Une méta-analyse de Xingang et al., de 2018 a étudié l’effet des vibrations sur la récupération des courbatures. Ils ont inclus 10 RCTs avec un total portant à 256 participants. Ils ont retrouvé un effet bénéfique sur la récupération sur différents points.

Un des effets positifs a été mis en valeur grâce à l’EVA (Echelle Visuel Analogique). Les vibrations permettraient de diminuer la douleur liée aux courbatures à 24h, 48h, et 72h après l’effort avec un soulagement maximal de la douleur à 48 heures.

Cet effet bénéfique sur la douleur a aussi été mis en valeur grâce au changement du taux de CK où la plus forte diminution du taux est à 48h après l’effort.

 

Foam roller (= FR)

Le foam roller est une stratégie de récupération passive reposant sur la libération auto-myofasciale (détente de la jonction entre les muscles et les fascias). C’est une stratégie que l’on voit de plus en plus souvent dans les routines de récupération chez les athlètes, mais aussi dans les routines d’échauffement chez certains notamment au cross fit.

Dans l’étude de Laffaye et al. de 2019 , en utilisant le foam roller comme modalité de récupération entre les séries d’exercices, il a été démontré que cela ne permet pas de récupérer plus vite, ni d’améliorer les performances lors de l’exécution des exercices. La libération myo-fasciale n’a également pas eu d’impact significatif (1% de différence) sur les performances de squat sauté ou de counter-movement jump entre la jambe massé et non-massée.

À ce jour, aucune étude n'a révélé un effet positif sur la performance. La principale explication de cette absence d'effet peut être liée au fait que la libération auto-myofasciale ne modifie que les propriétés du fascia, ce qui ne contribue que très peu à l'efficacité de la contraction de l'unité muscle-tendon.

Le FR à cependant démontré son effet dans l’étude de Laffaye et al., sur le gain d’amplitude lors de son utilisation. En effet, la jambe massée a gagné en amplitude en flexion/extension active et en flexion passive de la hanche de 4,2% par rapport à la jambe non massée. Ces données pourraient être dues au fait que la libération auto-myofasciale a diminué la douleur dans la jambe massée par rapport au groupe contrôle, où aucune intervention n’a été réalisé, comme le montre l’étude de Macdonald et al, en 2014.

À retenir: Le point positif à l’utilisation du FR est la diminution de la douleur qui engendrerait une capacité du sujet à gagné en amplitude.

 

Nutrition

Jus de betterave:

La consommation de forte dose (1,75 L au total, avec environ 2,8 g de composés phénoliques) de jus de betterave dans les 48 heures suivant un exercice de pliométrie excentrique (5 × 20 sauts de chute, 0. 6 m de hauteur) a entraîné une récupération nettement plus rapide du seuil de douleur à la palpation par rapport au placebo pendant une période de récupération de 72 heures. Il a également été démontré que le jus de betterave (2 litres au total) consommé pendant les 48 heures suivant un exercice de sprint répété permettait une récupération plus rapide des performances de « counter-movement jump » et des scores de l'indice de force réactive (critère de la qualité des schémas neuro musculaires) par rapport au placebo.

 

Jus de grenade:

Trombold et al., ont constaté que les sportifs amateurs qui consommaient du jus de grenade (800 ml/jour pendant 9 jours) par rapport à ceux qui consommaient un placebo isocalorique (qui apporte le meme nombre de calorie) après un exercice excentrique de 2 × 20 contractions volontaires maximales (= CVM) conservaient une fonction musculaire nettement plus importante à partir du cinquième jour de la supplémentation.

 

Une étude récente de Ammar et al., en 2016 a également démontré que les haltérophiles d'élite qui ont consommé du jus de grenade (750 ml/jour, 500 ml 1 h avant l'exercice) dans les 48 h précédant l'entraînement d’haltérophilie de haute intensité (snatch, clean and jerk et squat) ont signalé une douleur subjective plus faible au moment des 48 h suivant l'exercice et ont affiché des niveaux de CK et de LDH (marqueurs de l’inflammation) plus faibles après l'exercice par rapport au placebo.

 

Jus de cerise acidulé:

Une étude de Conolly et al., a démontré que pendant les 96 heures suivant un exercice excentrique du biceps (2 × 20, CMV) les diminutions de la production de force se sont significativement améliorées, et l’augmentation de la douleur subjective liées aux courbatures a également été significativement diminué pour les hommes ayant consommé 710 ml/jour de jus de cerises acidulées pendant 8 jours.

 

La consommation régulière de jus de cerises acidulées (environ 60 ml de jus concentré/jour ou 500 ml de jus/jour pendant 7-8 jours) semble également réduire les biomarqueurs des courbatures et la perception de la douleur immédiatement après et pendant les 48 heures de récupération après un exercice d'endurance intermittent ou prolongé dans diverses populations.

 

 

Nouvelles technologies

Myovolt est un appareil portable qui s’enroule autour d’une articulation facilitant la récupération musculaire en utilisant la thérapie de massage par vibration directement sur le corps. Myovolt combine des vibrations thérapeutiques avec un léger effet de réchauffement qui permettraient de masser et soulager les courbatures. En stimulant la circulation sanguine, Myovolt permettrait une récupération plus rapide des muscles après tout type d’activité physique. Il pourrait s’agir d’une stratégie supplémentaire pratique pour faciliter la récupération des sportifs notamment en cas de déplacements.   

 

Crédits: Myovolt.

 

Le BlackRoll Booster Set Slim est un foam roller qui combine les effets de l’auto massage et des vibrations puisque il est possible de le faire vibrer à différentes fréquences en continu de 12 à 56Hz. Cela favoriserait la récupération en réduisant les adhésions entre les fascias et les muscles et en facilitant leur régénération.

Crédits: BlackRoll

 

Conclusion

Comme l’on vient de le voir dans cet article, plusieurs outils sont à notre disposition et à celle de l’athlète pour réduire courbatures. Une stratégie doit être mise en place avec le sportif en amont de sa saison pour optimiser sa récupération. Cette stratégie ne doit pas se focaliser que sur un seul outil, mais sur plusieurs avec comme stratégie principale le sommeil et la nutrition.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

Sources:

Hotfiel, T., Mayer, I., Huettel, M., Hoppe, M. W., Engelhardt, M., Lutter, C., Pöttgen, K., Heiss, R., Kastner, T., & Grim, C. (2019). Accelerating Recovery from Exercise-Induced Muscle Injuries in Triathletes: Considerations for Olympic Distance Races. Sports (Basel, Switzerland), 7(6), 143. Article sous Creative Commons Attribution License (CC BY).

Milewski, M. D., Skaggs, D. L., Bishop, G. A., Pace, J. L., Ibrahim, D. A., Wren, T. A., & Barzdukas, A. (2014). Chronic lack of sleep is associated with increased sports injuries in adolescent athletes. Journal of pediatric orthopedics, 34(2), 129–133.

Fullagar, H., Skorski, S., Duffield, R., & Meyer, T. (2016). The effect of an acute sleep hygiene strategy following a late-night soccer match on recovery of players. Chronobiology international, 33(5), 490–505.

Halson S. L. (2014). Sleep in elite athletes and nutritional interventions to enhance sleep. Sports medicine (Auckland, N.Z.), 44 Suppl 1(Suppl 1), S13–S23. Article sous Creative Commons Attribution License.

Lu, X., Wang, Y., Lu, J., You, Y., Zhang, L., Zhu, D., & Yao, F. (2019). Does vibration benefit delayed-onset muscle soreness?: a meta-analysis and systematic review. The Journal of international medical research, 47(1), 3–18. Article sous Creative Commons Attribution-NonCommercial 4.0 License.

Laffaye, G., Da Silva, D. T., & Delafontaine, A. (2019). Self-Myofascial Release Effect With Foam Rolling on Recovery After High-Intensity Interval Training. Frontiers in physiology, 10, 1287. Article sous Creative Commons Attribution License (CC BY).

Macdonald, G. Z., Button, D. C., Drinkwater, E. J., & Behm, D. G. (2014). Foam rolling as a recovery tool after an intense bout of physical activity. Medicine and science in sports and exercise, 46(1), 131–142.

Harty, P. S., Cottet, M. L., Malloy, J. K., & Kerksick, C. M. (2019). Nutritional and Supplementation Strategies to Prevent and Attenuate Exercise-Induced Muscle Damage: a Brief Review. Sports medicine - open, 5(1), 1. Article sous Creative Commons Attribution 4.0 International License.

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