Qu'est-ce qu'une crampe musculaire, pourquoi apparaît-elle et que pouvons-nous faire?

Publié le : 4 octobre 2020 à 10h04

Article rédigé par Antoine Frechaud et Nathan Touati 

 

En tant que sportif nous avons tous déjà subi des crampes musculaires, mais sans savoir exactement pourquoi et qu’est-ce qui se produit réellement dans nos muscles et systèmes nerveux pour en arriver à une contraction musculaire involontaire si douloureuse.

La science en sait-elle plus à ce jour ? C’est ce que nous allons voir ce dimanche !

 

Introduction

Les crampes ont toujours existé dans l’histoire humaine. La littérature ne rapporte pas le moment exact où le premier phénomène de crampe est décrit en médecine ni le moment la distinguant d’un événement bénin par rapport à un événement symptomatologique.

Les crampes musculaires sont des contractions continues, involontaires, douloureuses et localisées dans un groupe musculaire entier, d’un seul muscle individuel ou de certaines fibres d’un seul muscle. Généralement, la crampe peut durer de quelques secondes à quelques minutes pour des causes idiopathiques (cause inconnue) ou connues chez des sujets sains ou en présence de maladies. À la palpation la zone musculaire de la crampe présentera un nœud dur.

La crampe musculaire associée à l’effort est la condition la plus fréquente nécessitant une intervention médicale/thérapeutique pendant le sport. L’étiologie spécifique n’est pas bien comprise et les causes possibles dépendent de la situation physiologique ou pathologique dans laquelle les crampes apparaissent. Il est important de noter qu’une contraction douloureuse limitée à une zone spécifique ne signifie pas que la cause de l’apparition de la crampe est nécessairement localisée à cet endroit précis.

Une crampe n’est presque jamais un effet local, mais concerne tout le système corporel : somatique et émotionnel.

 

Étiologie

L’étiologie de la crampe dépend de la situation dans laquelle elle se produit. Sans cela il n’est pas possible d’en dégager les causes et les éventuelles différences physiologiques ou pathologiques dans lesquelles se produit la crampe, car différents scénarios donnent lieu à des crampes.

Des crampes musculaires associées à la chaleur sont souvent observées pendant les sports et les exercices ou activités physiques intenses. Dans cette situation, on pense que de grandes pertes de sueur et d’électrolytes sont le mécanisme pathologique sous-jacent le plus courant.

 

Épidémiologie

La littérature n’explique pas clairement l’épidémiologie des crampes, car ces phénomènes musculaires peuvent apparaître différemment selon le contexte examiné. De plus, il n’y a pas de recherches qui prennent en compte le pourcentage de crampes, sans chercher les différentes pathologies, l’environnement sportif (chaud ou froid) ou le type de sport. Examiner l’épidémiologie des crampes n’est pas l’objectif principal du chercheur.

Voici quelques exemples :

  • L’âge des personnes âgées en France atteintes de crampes est d’environ 65 à 69 ans (sportif et non-sportif confondus).
  • Il n’y a pas de relation entre le sexe et les crampes.
  • La zone musculaire la plus touchée est le mollet à 80 %.
  • Les crampes nocturnes aux jambes touchent environ 6 % de la population américaine, dont l’état semble lié à des problèmes cardiaques et à la dépression.
  • Une étude américaine multicentrique a révélé que 74 % des crampes surviennent chez les athlètes et dans des conditions de chaleur environnementale élevée.
  • En Australie, 32 % des enfants atteints de la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A souffrent de crampes au mollet. Le phénomène augmente avec l’âge.

 

 Physiopathologie

La physiopathologie des crampes musculaires n’est pas toujours claire et dépend de l’état pathologique du patient. À titre d’exemple, chez les sujets sains et sportifs, il n’y a pas de relation directe entre l’épuisement des fluides et l’altération de l’équilibre électrolytique comme cause définitive de crampes.

Malgré l’épuisement des électrolytes pendant le traitement chez les patients dialysés, il n’y a pas de relation directe entre la présence de crampes et la dialyse. Malgré cela, le phénomène des crampes est très fréquent dans cette population de patients.

Aucune étude de biopsie n’évalue la morphologie et la structure des muscles des sportifs en cas de crampes. De nombreuses études évaluent la cellule musculaire dans de multiples maladies, où les conditions spécifiques d’une crampe sont décrites, mais n’est pas possible d’affirmer que le muscle sujet des crampes présente des particularités spécifiques par rapport aux altérations des fibres musculaires en présence d’une pathologie.

 

Diagnostic

Pour un examen du patient, en plus des antécédents médicaux, la posture du patient doit être observée, à la fois en position verticale (statique) et pendant la marche (dynamique). Il est nécessaire de comprendre si des déséquilibres musculaires sont présents. Les muscles doivent être palpés pour s’assurer que le tissu est homogène des deux côtés du corps.

Le patient est invité à stimuler la zone musculaire où les crampes apparaissent habituellement (contraction volontaire) pour que le praticien comprenne si un stress actif mécanique répété provoque la crampe. Il convient également de procéder à un étirement passif du muscle pour vérifier si la crampe apparaît en l’absence de stress actif de la part du patient. Une crampe causée par un étirement passif pourrait être liée à un symptôme et non à un événement bénin.

Plusieurs conditions pathologiques présentent des crampes musculaires. Voici quelques-unes des considérations les plus courantes :

 

  • Crampes nocturnes aux jambes

Le sommeil est un facteur de récupération extrêmement important pour les sportifs. Le fait de subir une crampe en dormant peut suggérer une mauvaise qualité de sommeil. En effet, après l’exercice lorsque l’athlète est en plein sommeil un pic de HGH (Human Growth Hormone)  a lieu, nécessaire à une synthèse protéique optimale pour réparer correctement les microtraumatismes générer lors de l’entrainement. Si ce processus est mal réalisé pour cause d’un sommeil de mauvaise qualité, les niveaux de cortisol vont augmenter en dépit des taux de HGH. Cela pourrait donc entrainer et favoriser l’apparition de crampes durant la nuit chez les athlètes.

Les crampes nocturnes aux jambes (CNJ) touchent environ 37 % de la population américaine de plus de 60 ans. La zone musculaire la plus touchée est le mollet. Les crampes nocturnes réduisent la qualité du sommeil et la qualité de vie des patients atteints. Le diagnostic est relativement simple : crampes et douleurs nocturnes aux jambes, qui peuvent disparaître avec l’étirement des muscles impliqués. Malgré la simplicité du diagnostic lors de l’anamnèse, l’étiologie exacte de tels événements est inconnue. Certaines causes peuvent être des activités où la personne se tient debout longtemps au travail ou effectue un grand effort physique pendant la journée.

Les facteurs prédisposants peuvent inclure des troubles d’électrolytiques ou des troubles neurologiques, des troubles hormonaux et métaboliques et des compressions de racines nerveuses ou de vaisseaux artériels comprimés. D’autres facteurs prédisposants pourraient être liés à la consommation constante de médicaments, tels que les diurétiques, les bêtabloquants et les statines. D’un point de vue électrophysiologique, les muscles avec des crampes ont un seuil d’activation plus bas. Le fait que les CNJ affectent principalement les personnes de plus de 60 ans peut indiquer que les crampes résultent de causes neurologiques. Avec l’âge, une personne a tendance à perdre des neurones médullaires, ce qui crée une incoordination neuromusculaire plus dans les membres inférieurs que dans les membres supérieurs. Ce trouble semble lié à la présence d’autres maladies, telles que l’insuffisance cardiaque, l’apnée nocturne (apnée du sommeil) ou un syndrome dépressif.

En tant que traitement conservateur, un massage profond, une bonne hydratation, une supplémentation en électrolytes ou des étirements sont considérés comme des options valables. Le traitement médicamenteux n’a actuellement pas donné de réponses adéquates si une pathologie sous-jacente n’en est pas la cause.

 

  • Crampes musculaires associées à l’exercice

La crampe musculaire associée à l’exercice (CMAE) est un événement qui se produit fréquemment pendant ou après une activité physique. Actuellement, deux hypothèses existent.

La première est liée au concept de déshydratation et de déséquilibre électrolytique, tandis que la seconde, la plus récente, est liée à un trouble neurologique périphérique transitoire. Les principaux résultats indiquent une fatigue périphérique d’origine neurologique comme cause de l’apparition de crampes. Les contractions musculaires continues augmentent les afférences des fuseaux neuromusculaires, avec un effet inhibiteur parallèle sur les organes tendineux de Golgi (mécanorécepteurs proprioceptifs). L’étirement réduit les efférences du deuxième motoneurone vers le muscle avec la crampe, améliorant en même temps les afférences du Golgi. La première théorie de l’altération électrolytique et des crampes ne se reflète pas dans la recherche sur les modèles humains.

Les étirements avant l’activité physique n’empêchent pas l’apparition d’une probable crampe par la suite.

 

  • Syndrome de crampe-fasciculation

Le syndrome de crampe-fasciculation (SFC) est un syndrome périphérique lié à une hyperexcitabilité du système nerveux périphérique. Cette situation entraîne la présence de crampes musculaires et/ou de fasciculations indésirables. Chez certains sujets, d’autres symptômes peuvent apparaître, tels qu’un engourdissement et une sensation de brûlure, typiques d’une neuropathie. La prévalence est plus importante chez les hommes. Nous n’avons pas d’explications ou de traitement adéquats pour cette condition.

 

Diabète

Chez les personnes diabétiques, l’apparition de crampes est liée à la présence d’une neuropathie, avec une hyperexcitabilité des nerfs périphériques. Le diabète de type I a un pourcentage de crampes inférieur (environ 60 %) par rapport au diabète de type II (environ 80 %). Dans le diabète de type II, la néphropathie est un autre facteur de crampes. Une autre cause probable de crampes est liée à l’altération de la vascularisation périphérique, créant des épisodes d’ischémie et de crampes.

 

D’autres facteurs de risques, pathologies telles qu’une cirrhose, une fibromyalgie, une sclérose latérale amyotrophique, problèmes rénaux ou encore une Neuropathie avec des anticorps anti-glycoprotéine associée à la myéline (Anti-MAG).

 

Évaluation

La palpation est la première évaluation : sous la main se sent comme une forte tension, qui peut concerner toute la zone musculaire ou un nœud localisé.

L’électromyographie est une autre évaluation qui peut être réalisée pour comprendre le type de décharge des unités motrices et diagnostiquer une pathologie neurologique à partir d’événements qui ne concernent pas la pathologie. L’échocardiographie permet d’évaluer des anomalies morphologiques cardiaques susceptibles de déclencher le phénomène de crampe.

 

Traitement/gestion

Le traitement conservateur le plus simple des sujets sains sans pathologies sous-jacentes est  l’étirement du muscle impliqué ou des massages profonds ainsi qu’une alimentation, hydratation et supplémentation en électrolytes adéquats. Un entrainement en augmentant la charge progressivement permet également d’habituer le muscle à des charges de plus en plus importantes et ainsi lui permettre de travailler a une intensité plus élevée plus longtemps.

La prévention chez les sujets sains pourrait impliquer un échauffement correct avant l’activité physique et une hydratation adéquate.

Au final, il reste encore des points à éclaircir quant à l’apparition des crampes et à la compréhension des processus physiologique qui en découle.

 

Nouvelles avancées  

Boisson supplémentée en électrolytes : La consommation d’une boisson supplémentée en glucidique et électrolyte avant et pendant l’exercice dans un environnement chaud peut retarder l’apparition des crampes, permettant ainsi aux participants de faire de l’exercice plus longtemps à une intensité élevée. Cependant, il semble que la déshydratation et la perte d’électrolytes ne soient pas les seules causes des apparitions de crampes, car 69 % des sujets ont présenté des crampes même lorsqu’ils étaient hydratés et supplémentés en électrolytes bien que le taux soit plus faible que dans le groupe sans électrolytes.

La boisson la plus connue est évidemment POWERADE, mais il existe d’autres fabricants tels que Vitargo qui propose soit des doses de poudres ou des « cachets » effervescents à mettre directement dans son eau ou sa boisson lors de l’effort.

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

 

Sources: 

Bordoni B, Sugumar K, Varacallo M. Muscle Cramps. [Updated 2020 Sep 13]. In: StatPearls [Internet]. Treasure Island (FL): StatPearls Publishing; 2020 Jan – . Creative Commons Attribution 4.0.

Jung, A. P., Bishop, P. A., Al-Nawwas, A., & Dale, R. B. (2005). Influence of Hydration and Electrolyte Supplementation on Incidence and Time to Onset of Exercise-Associated Muscle Cramps. Journal of athletic training, 40(2), 71–75.

Lamoureux, Monique Edith, "Does Sleep Affect Delayed Onset Muscle Soreness (DOMS) In Olympic Hockey Players?" (2015). Theses and Dissertations. 1795. https://commons.und.edu/theses/1795

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