Lésions cérébrales traumatiques (LCT) et Parkinson chez les athlètes

Publié le : 28 mars 2020 à 22h36

Article rédigé par Antoine Frechaud

 

Dans cet article nous allons parler des lésions cérébrales traumatiques (LCT) chez les athlètes. L’évolution de la préparation physique, des surfaces de jeu, des équipements, de l’entraînement, des tactiques de jeu et les enjeux financiers entre autres ont donné suite à une augmentation des performances sportives. Les sports de contact tel que le rugby, football américain, hockey, sports de combat ont vu le nombre de traumatismes crâniens augmenter ces dernières années. D’autres sports comme la gymnastique, la moto cross, sports de glisse, ne sont pas oubliés, mais le contact n’est généralement pas direct et n’inclut pas un duel physique entre deux adversaires. Les athlètes sont de plus en plus grands, plus lourds, plus athlétiques et plus puissants, ce qui lors de collisions, augmente le risque et le niveau de gravité des blessures.

Les lésions cérébrales traumatiques (LCT) résultent de l'application d'une force physique externe au cerveau qui entraîne des altérations structurelles et fonctionnelles transitoires ou permanentes. Les rapports du CDC (centers of disease control and prevention), montrent que le nombre de commotions cérébrales reste à un taux très élevé malgré les précautions prises par les comités sportifs.

Chez les boxeurs professionnels, 80% ont eu une commotion lors de leur carrière et chez les hockeyeurs 10% ont également déjà subi une commotion.

Crédits: https://carolinahealthspan.com/tbi-concussion/

Au football américain, la NFL (National Football ligue) a instauré un programme d’étude analysant les cerveaux d’anciens joueurs de football américain morts. Cette recherche fut menée par le Dr Ann McKee, neuropathologiste; elle a examiné le cerveau de 111 joueurs de NFL décédés dont 110 d'entre eux présentaient une encéphalopathie traumatique chronique (ETC), qui serait causée par des coups répétés à la tête qui peuvent entraîner entre autres: perte de mémoire, confusion, dépression et démence.

On comprend donc pourquoi de nos jours, les protocoles de commotion que ce soit en rugby, boxe ou d’autres sports à risque font maintenant partie du sport et prennent une place importante dans la prévention de ces pathologies et de leurs complications.

Ce sont des complications au coeur du débat dans le monde du sport et aujourd’hui nous allons parler des conséquences à court ou long terme d’une LCT et de l’une des « probable » complications à long terme et qui fait parler d’elle dans beaucoup de sport de nos jours: la maladie de Parkinson.

Tout d’abord les lésions cérébrales comme je l’ai dit précédemment résultent de l'application d'une force physique externe au cerveau qui entraîne des altérations structurelles et fonctionnelles transitoires ou permanentes. Lors de coma ou de pertes de connaissance suite à un traumatisme, on peut classifier le danger à 3 niveaux: léger, modéré et sévère selon le score de Glasgow

 

RÉPONSE MOTRICE

RÉPONSE VERBALE

OUVERTURE DES YEUX

1

Nulle

Nulle

Nulle

2

Extension

Incompréhensibe

À la douleur

3

Flexion

Inappropriée

Au bruit

4

Évitement

Confuse

Spontanée

5

Orienté

Normal

 

6

Aux ordres

 

 

 

Il faut classer les aptitudes de la personne en état de choc dans les 3 différentes colonnes puis calculer la somme des 3 colonnes pour avoir le niveau de gravité du traumatisme.

Score 3-8: Sévère

Score 9-12: Modéré

Score 13-15: Léger

 

Les LCT peuvent également être asymptomatiques sur l’instant T lors de la percussion, mais on peut reconnaitre des comportements qui peuvent mettre sur une piste de LCT dans les moments suivant le choc:

Crédits: http://www.thinglink.com/scene/347903385736839169

Une classification (exhaustive) des symptômes peut être faite en fonction des zones du cerveau affectées.

 

 

 

ZONE SAINE

ZONE AFFECTEE (LCT)

Lobe frontal

Langage, concentration, résoudre des problèmes

Manque de concentration, irritabilité, langage désorganisé

Lobe occipital

Vision claire

Vision floue, point obscure dans le champ de vision

Lobe pariétal

Douleur, sens du toucher, température corporelle

Perception spatiale affectée, difficultés à lire

Lobe temporal

Mémoire, organisation

Problèmes de mémoire à court et long terme

Cervelet

Coordination et équilibre

Difficultés à la marche, troubles de l’élocution

Tronc cérébral

Respiration, rythme cardiaque

Difficultés à avaler, changement dans le rythme respiratoire

 

Lors d’une LCT il n’y aura généralement pas qu’une seule zone du cerveau atteinte, plusieurs zones peuvent être touchées et donc plusieurs symptômes de différentes catégories retrouvés lors du bilan.

Nous allons maintenant aborder le thème de la maladie de Parkinson, et pour commencer on va différencier maladie de Parkinson et Parkinsonisme ou syndrome parkinsonien atypique.

La maladie de Parkinson (MP) est une maladie neurologique chronique dégénérative, c’est le deuxième trouble neurodégénératif le plus courant, impliquant un trouble du mouvement. Ses causes sont mal connues, mais elle est couramment caractérisée par une perte progressive des neurones dopaminergiques dans la substance noire et donc une baisse du niveau de dopamine dans le corps.

C’est une maladie très complexe qui varie en fonction des cas, mais les conséquences majeures de cette maladie sont les tremblements de repos, la bradykinésie (ralentissement des mouvements et la perte de la finesse du mouvement), une instabilité posturale et une rigidité musculaire.

Crédits: https://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_de_Parkinson#/media

Le parkinsonisme quant à lui est un terme général qui fait référence à un groupe de troubles neurologiques qui provoquent des problèmes de mouvement similaires à ceux observés dans la maladie de Parkinson comme les tremblements de repos, les mouvements lents et la raideur. Dans la catégorie du parkinsonisme, il existe un certain nombre de troubles, dont certains doivent encore être clairement définis ou nommés.

Les facteurs de risques restent flous, des pistes sont étudiées, entre autres: le tabac, la sédentarité, l’exposition à des substances à risque (pesticides, solvants, produits chimiques) et la génétique.

Mais nous allons nous concentrer sur une probable cause de parkinson chez les sportifs, soit les LCT qui surviennent chez les athlètes lors des sports de contact.

 

Y a-t-il un lien entre LCT et Parkinson chez les athlètes ?

On a pu constater dernièrement une véritable mobilisation autour de ce phénomène, avec des documentaires, d’anciens sportifs professionnels ou des familles d’athlètes de NFL, hockey et d’autres sports à risque qui ont pris la parole pour sensibiliser les autorités sur la dangerosité de certains sports et sur les conséquences dévastatrices qu’ils pouvaient avoir sur le corps humain. Mais où en sommes-nous au vu des recherches récentes à ce sujet ?

Le traumatisme crânien a été identifié pour la première fois comme un facteur de risque potentiel de MP par Martland en 1928, lorsque des blessures répétées à la tête chez des boxeurs qui entraînaient des symptômes parkinsoniens ainsi qu'un déclin cognitif, qu'il avait surnommé «punch drunk».

Ensuite, avec le diagnostic positif de Muhammad Ali à la maladie de parkinson plusieurs études ont été réalisées avec environ la moitié des études prédisant une corrélation positive entre LCT et MP et l’autre moitié ni voyant aucune corrélation.

Crédits:  https://parkinsonquebec.ca/nouvelles-parkinson-general/retour-sur-la-mort-de-mohamed-ali/

Toujours aujourd’hui les études ne sont pas tout à fait claires, et d’autres sont en cours sur le fait que les lésions cérébrales traumatiques pourraient augmenter le risque de maladie de Parkinson (MP).

Dans de nombreuses études épidémiologiques, mais pas toutes, on peut y voir une corrélation donnant lieu à des spéculations. Notamment l’étude de Bower et al., 2003 « Head trauma preceding PD: a case-control study.» et une de Goldman et al., 2006. « Head injury and Parkinson's disease risk in twins. »

Une étude sur des souris a également montré une corrélation entre LCT et une augmentation des différents marqueurs de la MP.

Ce genre d’études reste tout de même discutable et ne peut affirmer une forte corrélation de cause à effet. Également les risques de MP en fonction du nombre et des grades de sévérité des LCT ne sont pas connus.

Il reste beaucoup de travail de recherche à réaliser pour prouver une corrélation positive, mais c’est un sujet au centre du débat et des études sont en cours. Au vu du nombre croissant de pathologies et complications, mais également de la constante progression des performances sportives, les solutions préventives aux LCT vont devenir un besoin critique dans les années à venir. Il pourrait y avoir d’autres causes à explorer également, génétique, utilisation de produits dopants, etc.

 

Nouvelles technologies 

Dans la suite de l’article, nous allons parler des nouvelles technologies mises en place pour prévenir les LCT chez les athlètes:

 

FitGuard:

Mesure l’accélération de l’impact reçue par l’athlète lors d’un choc et donne une indication colorée au niveau du bas du protège-dent: vert = peu de risque de commotion, rouge = fort risque de commotion. (Voir vidéo)

Crédits: https://www.everydayhealth.com/neurology/symptoms/high-tech-mouthguards-can-detect-concussions-on-impact/

 

 

Ce type de technologies n’est pas encore assez performant en raison des taux d’erreurs et de la faible spécificité et sensibilité dans la prévision des blessures par commotion.

 

Vicis ZERO 1:

Conçu pour le football Américain, c’est un casque flexible doté d'une coque extérieure souple et est doublé à l'intérieur d'une couche absorbant les chocs de colonnes rembourrées. Les filaments constituant le casque sont conçus avec précision pour atténuer chocs lors des collisions, tandis que les colonnes internes se plient de manière omnidirectionnelle, répondant aux impacts sous tous les angles. Cela permet de dissiper uniformément la pression dans toute la tête, par opposition à une absorption des chocs dans une zone isolée. (Voir vidéo)

Crédits: https://www.freeenterprise.com/these-companies-are-tackling-footballs-concussion-conundrum/

Il n’y a pas encore d’étude prouvant l’efficacité de ce casque, mais on voit que de l’argent est investi et des mesures sont mises en place pour prévenir ce type de problèmes que ce soit à court terme pour les LCT et long terme pour les maladies comme la MP, Alzeihmer ou d’autres conséquences de celles-ci.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

Cet article n'inclut pas de partenariat commercial avec les produits cités. Ils ne sont présentés qu'à titre d'exemple en rapport avec l'article.

 

Sources:

Sundman, M. H., Hall, E. E., & Chen, N. K. (2014). Examining the relationship between head trauma and neurodegenerative disease: A review of epidemiology, pathology and neuroimaging techniques. Journal of Alzheimer's disease & Parkinsonism, 4, 137. https://doi.org/10.4172/2161-0460.1000137

DeMaagd, G., & Philip, A. (2015). Parkinson's Disease and Its Management: Part 1: Disease Entity, Risk Factors, Pathophysiology, Clinical Presentation, and Diagnosis. P & T : a peer-reviewed journal for formulary management, 40(8), 504–532.

Kenborg, L., Rugbjerg, K., Lee, P. C., Ravnskjær, L., Christensen, J., Ritz, B., & Lassen, C. F. (2015). Head injury and risk for Parkinson disease: results from a Danish case-control study. Neurology, 84(11), 1098–1103. https://doi.org/10.1212/WNL.0000000000001362

Selassie, A. W., Wilson, D. A., Pickelsimer, E. E., Voronca, D. C., Williams, N. R., & Edwards, J. C. (2013). Incidence of sport-related traumatic brain injury and risk factors of severity: a population-based epidemiologic study. Annals of epidemiology, 23(12), 750–756. https://doi.org/10.1016/j.annepidem.2013.07.022

Gardner, R. C., & Yaffe, K. (2015). Epidemiology of mild traumatic brain injury and neurodegenerative disease. Molecular and cellular neurosciences, 66(Pt B), 75–80. https://doi.org/10.1016/j.mcn.2015.03.001 Journal of Neuropathology & Experimental Neurology, Volume 77, Issue 9, September 2018, Pages 757–768, https://doi.org/10.1093/jnen/nly065 Published: 25 July 2018

Sundman, M. H., Hall, E. E., & Chen, N. K. (2014). Examining the relationship between head trauma and neurodegenerative disease: A review of epidemiology, pathology and neuroimaging techniques. Journal of Alzheimer's disease & Parkinsonism, 4, 137. https://doi.org/10.4172/2161-0460.1000137

O'Connor, K. L., Rowson, S., Duma, S. M., & Broglio, S. P. (2017). Head-Impact-Measurement Devices: A Systematic Review. Journal of athletic training, 52(3), 206–227. https://doi.org/10.4085/1062-6050.52.2.05

Bower JH, Maraganore DM, Peterson BJ, McDonnell SK, Ahlskog JE, Rocca WA. Head trauma preceding PD: a case-control study. Neurology. 2003 May 27; 60(10):1610-5.

Goldman SM, Tanner CM, Oakes D, Bhudhikanok GS, Gupta A, Langston JW. Head injury and Parkinson's disease risk in twins. Ann Neurol. 2006 Jul; 60(1):65-72.

Liens web:

 

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